Le piège du licenciement pour inaptitude pour l’employeur
Licencier un salarié déclaré inapte peut donner des sueurs froides à l’employeur tant les règles paraissent nombreuses, complexes….et pénibles.
Le risque pour l’employeur, in fine, est la condamnation à des dommages et intérêts ou à l’annulation pure et simple de la procédure….
Si tant est que l’inaptitude soit d’origine professionnelle, que le salarié en question soit procédurier (ou encore qu’il s’agisse d’un salarié protégé) et la crainte d’une erreur ou d’un oubli restent présentes.
La prise en compte de l’état de santé d’un salarié est totalement interdite dans toute mesure le concernant constitue une atteinte au principe de non-discrimination.
L’article 1132-1 du Code du travail est en effet clair:
« (…..) Aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte (….) en raison de son état de santé »
Licencier un salarié en raison de son inaptitude ne constitue pas une exception à cette règle.
En effet, dans ce cas de figure, ce n’est pas l’état de santé du salarié qui est la cause de son licenciement, mais l’impossibilité pour lui d’exécuter les tâches liées à son contrat de travail.
La nuance semble mince et est pourtant essentielle.
Cet article n’a pas vocation à aborder l’intégralité des pièges du licenciement pour inaptitude.
Ces derniers sont détaillées dans le guide juridique de l’employeur engagé dans une procédure de licenciement pour inaptitude.
Piège n°1 Ne pas suffisamment justifier de l’impossibilité de reclasser le salarié.
A l’impossible nul n’est tenu:
Si votre entreprises n’a pas la trésorerie pour financer une adaptation de poste ou que le.s poste.s compatible.s avec l’état de santé de votre salarié est déjà pourvu, le licenciement est inévitable.
Toutefois, il est particulièrement important de justifier et de détailler les motifs de l’impossibilité et ce, par écrit et avant l’entretien préalable au licenciement. Une création de poste ne suffit pas, en elle-même, à justifier que la recherche de poste a été correctement effectuée (c’est à dire sérieusement et loyalement).
Le piège du licenciement pour inaptitude est alors de ne pas suffisament préparer, en amont, la procédure et de ne pas laisser de traces écrites et détaillées.
La recherche du reclassement doit être loyale:
A défaut de quoi, le salarié qui se voit proposer un (ou plusieurs) poste.s peut les refuser puis demander des dommages et intérêts s’il estime que la recherche de poste n’a pas été loyale:
Ainsi, si un poste est disponible et que le salarié a, par ailleurs, fait connaitre son souhait d’y être reclassé, mais que l’employeur propose au salarié un (ou même plusieurs) autre.s poste.s à ce dernier, la recherche de reclassement est considérée comme déloyale et ce, même si les postes proposés sont parfaitement conformes aux prescriptions du médecin du travail1.
Par conséquence, si la recherche d’un poste de reclassement est réalisée parce que l’employeur rechigne à procéder aux aménagements nécessaires la requalification du licenciement pour inaptitude en « licenciement sans cause réelle et sérieuse » est encourue.
Bien sûr, si les aménagements, adaptations ou transformations des postes existants au sein de l’entreprise sont trop coûteux pour l’employeur, l’impossibilité de reclassement est caractérisée.
Le médecin du travail, dès son avis d’inaptitude avait mentionné qu’un poste de conducteur d’engins étaient compatibe avec l’état de santé du salarié.
L’empoyeur avait toutefois proposé trois autres postes que le salarié avait tous refusé. Ce dernier avait obtenu la condamnation de son employeur.
En effet, l’employeur en « misant » sur le refus du salarié, ne respecte pas son obligation de recherche loyale.
Piège n° 2: Ne pas organiser la visite de reprise.
La jurisprudence a, très récemment jugé que le salarié en fin d’arrêt maladie avait droit à sa rémunération en l’absence de visite de reprise dans la mesure où il se tenait à disposition de son employeur.
« Le salarié qui, à l’issue de son arrêt de travail, se tient à la disposition de l’employeur pour passer la visite médicale de reprise, a droit au paiement de sa rémunération ».
Cour de cassation 24 janvier 2024, n° 22-18.437.
Piège n°3: Mentionner l’état de santé du salarié dans la lettre de licenciement
Cette erreur peut coûter cher à l’employeur, a fortiori si l’employé déclaré inapte justifie d’une ancienneté conséquente.
Le Conseil des prud’hommes estime logiquement que le préjudice (et l’indemnisation) du salarié est corrélative à son ancienneté.
Conscient du risque, le législateur a établi des modèles types de lettre de licenciement pour inaptitude en introduisant le décret n° 2017-1820 du 29 décembre 2017.
Ce souci louable d’accompagnement de l’employeur a toutefois été brouillé par le défaut de lisibilité du décret qui n’a pas su tenir compte de la réalité et de la diversité des situations particulières:
Salarié absent à l’entretien préalable, inaptitude d’origine professionnelle, impossibilité de reclassement ou refus catégorique du salarié des postes proposés en guise de reclassement…..
La procédure de licenciement pour inaptitude professionnelle: Notre pack
procédure de licenciement pour inaptitude
Piège n°4: Ne pas consulter le CSE
L’employeur qui omet de consulter le CSE quand à l’existence d’une procédure en cours et à la recherche de poste encourt l‘annulation pure et simple du licenciement.
Ne pas préparer l’entretien préalable au licenciement
S’il s’agit d’un entretien (presque) comme un autre sur le plan procédural, voire notre article en lien, l’employeur devrafaire preuve de vigileance sur deux points:
Le comportement: Il est parfaitement normal d’adapter le ton de l’entretien au motif du licenciement. Par ailleurs, un salarié reçu sans considération sera plus prompt à intenter une action contre son ancien employeur, notamment dans l’hypothèse où ce dernier ne lui règle pas une partie de ses indemntiés en raison d’un refus de poste abusif.
L’employeur devra tenter de connaître les intentions de son salarié concernant une éventuelle contestation de l’avis d’inaptitude devqnt le conseil des prud’hommes en cours;
En effet, et en ce cas, l’employeur devra suspendre la procédure le temps que le conseil tranche.
A retenir: Le piège du licenciement pour inaptitude et de l’annulation de la procédure et/ou d’une action en dommages et intérêts de la part du salarié doit être analysée par l’employeur prudent.
Notre guide juridique clair et détaillé a été spécialement conçu par un juriste en droit du travail à destination de l’employeur engagé dans une procédure de licenciement pour inaptitude.
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