
Image de Freepik
Les modes de rupture du contrat de travail à l’initiative du salarié en cas de harcèlement moral
Quels sont les modes de rupture du contrat de travail ouverts au salarié victime de harcèlement?
La démission est-elle la seule option?
Tour d’horizon:
La rupture conventionnelle
La rupture conventionnelle n’a -absolument- pas à être acceptée par l’employeur et résulte, comme tout contrat, d’un accord de volonté.
Elle a un coût pour l’employeur. Ce dernier doit donc avoir d’excellentes raisons (financières) pour vous l’accorder.
Aussi, si vous souhaitez tenter une telle demande, il est important d’anticiper vos arguments (et de sortir votre calculatrice).
Lire article dédié Le risque prud’homal et la rupture conventionnelle.
L’objectif étant de convaincre l’employeur qu’il serait dans son intérêt (et dans celui de l’entreprise) de vous l’accorder.
NB Il est possible de demander une rupture conventionnelle même en arrêt de travail,
Si l’employeur vous oppose malgré tout une fin de non-recevoir, tout n’est pas perdu pour autant.
Il est donc essentiel de ne pas se laisser décourage ni dépérir dans des conditions de travail devenues invivables:
La résiliation judiciaire
Ce mode de rupture du contrat de travail est réservé au salarié patient…
Elle consiste en effet à demander au juge de résilier le contrat de travail1Article 1231-1 du Code du travail.
Si le juge refuse, le contrat de travail se poursuivra.
Ce mode de rupture du contrat de travail implique que le salarié attende (un an voire davantage) que son litige soit tranché devant le Conseil des prud’hommes tout en continuant à travailler au sein même de l’entreprise.
Ce mode de rupture n’est donc pas particulièrement adapté à la situation d’un salarié victime de harcèlement.
L’inaptitude
L’inaptitude professionnelle permet de faire valoir que l’état de santé du salarié n’est pas (ou plus) compatible avec le poste qu’il occupe dans l’entreprise.
Il est parfaitement possible de la faire reconnaitre par un salarié harcelé.
En effet, le harcèlement moral a des conséquences directe sur la santé mentale et physique du salarié (stress, burn-out, dépression) qu’il appartiendra au médecin du travail de reconnaître.
L’inaptitude ne signifie en aucun cas qu’un salarié inapte est invalide.
Cela ne signifie pas non plus que ce dernier n’est plus apte à travailler (sauf dans les cas très précis où le médecin de travail le mentionne expressément) ou qu’il ne peut plus occuper le même poste que celui qu’il exerçait auparavant, que ce soit au sein d’une autre entreprise, ou même de la même, dans un service différent au besoin.
Le médecin du travail peut d’ailleurs parfaitement proposer un reclassement, une mutation, voire une création de poste, que le salarié sera libre d’accepter ou non.
Lire également: Refus de reclassement du salarié
Attention toutefois, l’inaptitude consécutive au harcèlement moral d’un salarié est nul2Cour de cassation 29 septembre 2011, 10-12.722, Publié au bulletin et Cour de cassation 1er février 2023 n°21.18-789.
Ce mode de rupture du contrat de travail peut être privilégié par le salarié qui ne disposerait pas de suffisamment d’éléments de preuve du harcèlement.
A contrario, le salarié, licencié pour inaptitude (professionnelle ou non) pourrait, après-coup, engager une action prud’homale et obtenir l’annulation du licenciement.
La prise d’acte
Très facile, dans la forme à mettre en œuvre elle présente toutefois des risques importants pour le salarié qui ne serait pas en mesure de prouver le harcèlement subi:
Concrètement, le salarié prend acte, par courrier recommandé, de l’impossibilité de maintenir le contrat de travail en raison du comportement de l’employeur.
Ce dernier lui remettra les documents obligatoires et notamment l’attestation à destination de Pôle emploi laquelle mentionnera « Autre motif » avec la mention « prise d’acte ».
Le salarié ne percevra, jusqu’à décision du juge, aucune allocation chômage.
Par ailleurs, le salarié s’expose à deux risques, s’il est débouté:
- La requalification par le juge de sa prise d’acte en démission;
- Le paiement d’indemnités de préavis à l’employeur (uniquement si le préavis n’a pas été respecté).
- Le paiement de dommages et intérêts (uniquement si l’employeur prouve que le départ brutal du salarié lui a porté préjudice).

Image de onlyyouqj sur Freepik
Démission légitime, démission contrainte
La démission contrainte
Elle permet de demander au juge de requalifier la démission. en licenciement injustifié.
Cette requalification est demandée lorsque le salarié poussé à bout, (parfois suite au refus de sa demande de rupture conventionnelle) décide de rendre les armes et de démissionner.
Son consentement à la démission est donc vicié par les agissement de l’employeur.
Si le harcèlement moral est reconnu, la démission sera ainsi requalifiée par le juge en licenciement nul (avec les indemnités correspondantes) .
La démission légitime
Votre démission est légitime si vous êtes victime d’actes délictueux dans le cadre de votre travail et qu’une plainte a été déposée.
Vous pouvez alors demander le réexamen par Pôle emploi de votre demande d’allocation au bout de 121 jours.
Si votre demande est acceptée, le point de départ du versement de l’ARE est fixé au 122e jour de chômage.
Conclusion
Quand le burn-out et le harcèlement subis rendent impossible le maintien du contrat de travail, la démission (qui prive le salarié de ses droits au chômage) n’est pas la seule option.
Toutefois, quelque soit l’option en la faveur de laquelle le salarié décide de s’orienter, la preuve du harcèlement constitue toujours l’enjeu décisif de sa reconnaissance.
Le moral du salarié est également un facteur essentiel. Il est en effet particulièrement difficile de mener bataille et de réunir les éléments permettant de faire valoir ses droits dans des situations où le quotidien est brutalement affecté.
Lire également : La preuve du harcèlement moral.